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Un espace pour respirer et me souvenir de ce que j'aime… Un lieu aussi où nous serons deux à nous exprimer, Marcelle et Jean-Louis.
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jeudi 15 mai 2008

L'orgueil

Orgueil mon rempart, ma blessure, source de force, puits d'amertume. Je n'ai besoin de personne, mais je requiers la reconnaissance de tous ; si je ne suis le meilleur, je suis parmi les meilleurs, pourtant les sots l'ignorent. Un groupe se forme où j'aurais ma place, cependant je ne m'y mêlerai point. Que l'on me désire et vienne me chercher, alors peut-être condescendrai-je à laisser miroiter mes facettes. Que je sois beau ou laid n'a pas d'importance, puisque je suis irrésistible quelle que soit mon humeur : sombre, hiératique, j'impressionne, gai je ravis, mon manteau de feu illumine les places austères. Qu'on ne s'y trompe pas, je ne quête rien, me sont dûs révérence, sourires, propos flatteurs —sincères bien entendu. J'aime la louange intelligente, c'est-à-dire celle que je m'adresserais moi-même si la fierté ne me sauvait de ce ridicule. J'admets que chacun est unique, mais je suis plus unique que chacun. Que l'on m'aime je rayonnerai, que l'on m'apprécie je scintillerai. Je n'oublie aucune offense, humilié je crève de haute rage rentrée, dévastatrice, un ouragan m'habite que personne ne décèle. Médiocrité, pacotille, je vous hais, je ne veux être rien si je ne suis pas tout, me cacher sous la fange même, si je ne puis fasciner, en attendant mon heure. Je suis cet individu rare qui connaît la beauté, mais je demeure seul, plus souvent meurtri, incompris, qu'importe ! Je possède les clefs de l'infranchissable, là où je suis de pierre dure, dans l'antre le plus reculé de mon être où je pense et ne dis jamais rien. Orgueil.

Les sept péchés capitaux. N°80 de la revue Griffon -1987

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